Limiter la contamination par les aflatoxines
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Limiter la contamination par les aflatoxines

Les aflatoxines sont des toxines produites par des champignons qui colonisent le maïs, le sorgho, les arachides, le millet, le manioc et les piments et d’autres produits de base cultivés en Afrique. Cette contamination a de nombreuses conséquences, notamment des répercussions négatives sur la santé humaine, la sécurité alimentaire et le commerce. Le CTA et la Commission de l’Union africaine, à travers le Partenariat pour lutter contre l’aflatoxine en Afrique (PACA), s’emploient actuellement à associer le secteur privé à cette lutte et à développer des solutions durables pour relever ce défi complexe dans les pays d’Afrique

Les aflatoxines – des toxines transmises par les aliments et produites par une moisissure (Aspergillus species) – nuisent aux efforts déployés par l’Afrique pour assurer sa sécurité alimentaire, améliorer la nutrition et réaliser une croissance économique prospère emmenée par le secteur de l’agriculture. Une étude publiée en 2016, commandée par le CTA en association avec le PACA et dirigée par le professeur Sheila Okoth, a confirmé que ces métabolites fongiques, omniprésents sur le continent, représentent un risque majeur pour la santé humaine et le commerce. Les aflatoxines ont été incriminées dans le cancer du foie ainsi que dans le retard de croissance et le kwashiorkor chez les enfants. Leur présence nuit également au commerce domestique, intra-régional et international ; selon les estimations, les aflatoxines feraient perdre au continent entre 400 et 600 millions d’euros par an en recettes d’exportation.

Selon les experts, la lutte contre cette mycotoxine ne pourra être gagnée que si de multiples acteurs coordonnent leurs efforts en vue d’atténuer les risques tout au long des chaînes de valeur des aliments susceptibles d’être contaminés. Ces actions concertées doivent s’accompagner de politiques et de règlements efficaces et être soutenues par des ressources humaines et financières appropriées. La mise en place d’un cadre institutionnel solide (comprenant des laboratoires bien équipés) joue ici un rôle essentiel.

Au cours de ces dernières années, la priorité est de plus en plus allée au renforcement d’alliances avec le secteur privé, en particulier les organisations de petits agriculteurs et les leaders industriels. Face aux pertes économiques élevées, ces alliances sont considérées comme essentielles pour assurer la direction de l’agenda commun de lutte contre la contamination par l’aflatoxine. Les partenariats public-privé-producteurs associés à cette lutte en Afrique peuvent apporter une importante contribution, en améliorant la santé publique et la nutrition, en développant le secteur agroalimentaire et en ouvrant de nouvelles opportunités commerciales.

À la lumière de ce qui précède, le PACA et le CTA ont réuni une table ronde en marge de la 2e réunion de la plateforme du PACA à Entebbe, en Ouganda. L’événement, organisé le 11 octobre 2016, visait à développer une stratégie d’implication du secteur privé et des critères d’évaluation pour une lutte efficace contre l’aflatoxine dans ce secteur. La table ronde a rassemblé plus de 35 participants, parmi lesquels des PDG et des responsables de programme, des producteurs, des minotiers, des négociants et des transformateurs des filières arachides, céréales, piments et café, ainsi que des fournisseurs d’intrants et de matériel, des prestataires de services techniques et financiers et des partenaires du développement de toute l’Afrique et d’autres continents. Des représentants d’AFRI-Nut (Malawi), de l’Association des minotiers (Kenya), du CTA, de GrainPro (Afrique de l’Est), de Meds For Kids (MFK, Haïti), de Nestlé (Afrique de l’Ouest), du PACA et de l’USAID, ainsi que des organisations de femmes d’Ouganda et du Zimbabwe étaient également présents.

La table ronde a présenté de manière détaillée sept interventions efficaces afin de montrer comment le secteur privé a géré le défi de l’aflatoxine. L’une d’elles est le modèle de MFK – une des 20 plus grandes innovations du CTA – qui encourage l’utilisation de stratégies de lutte appropriées sur toute la chaine de valeur en Haïti. Le modèle de MFK aide les petits exploitants agricoles à lutter contre la contamination par l’aflatoxine par le biais de la formation, de la recherche collaborative et d’incitatifs à l’achat. Ce soutien a permis aux agriculteurs d’avoir accès au crédit et d’augmenter leurs rendements de 30 % et leurs revenus de 100 %. Depuis 2012, une entreprise privée, Acceso Peanut Enterprise, diffuse ce modèle dans d’autres régions du pays, ouvrant ainsi de nouveaux débouchés à davantage d’agriculteurs. Nestlé a également évoqué son expérience en Afrique de l’Ouest, où elle a limité les taux de rejet à 4 % en 2013 (contre 50 % en 2007) et incité les agriculteurs à respecter les limites strictes jugées acceptables fixées à 4 µg d’aflatoxine /kg de maïs.

D’autres entreprises et organisations du secteur privé ont également lancé des initiatives qui leur ont permis d’accroître leur part de marché et de répondre aux demandes des consommateurs tout en améliorant la notoriété de leur marque et la reconnaissance de leur qualité. En voici quelques-unes :

  1. Autorégulation et adoption de normes internes, qui dans certains cas, sont plus strictes que les normes nationales et internationales ;
  2. Crédits pour l’acquisition d’intrants et paiement d’un prix plus élevé aux agriculteurs pour les produits de qualité ;
  3. Formation des agriculteurs aux bonnes pratiques agricoles et dépistage de l’aflatoxine tout au long de la chaîne de valeur ;
  4. Création de joint ventures avec de grands centres de recherche ;
  5. Création d’alliances avec d’autres acteurs et groupes de producteurs du secteur privé ; 
• Investissements dans le renforcement des capacités du personnel et dans le développement d’infrastructures.

Les actions prioritaires suivantes ont été intégrées dans une stratégie d’engagement du secteur privé dans la lutte contre l’aflatoxine:

  • Mobilisation de mécanismes de subventions pour améliorer l’accès aux technologies et aux services qui soutiennent l’innovation ;
  • Création d’alliances avec des associations de consommateurs pour la sensibilisation à l’importance des aliments sains ;
  • Création d’alliances avec des groupes/associations/coopératives d’agriculteurs pour généraliser l’adoption de bonnes pratiques agricoles et l’approvisionnement collectif ;
  • Actions de lobbying auprès des gouvernements pour l’introduction d’incitants à l’innovation dans les chaînes de valeur des denrées alimentaires et aliments pour animaux, et modernisation de la réglementation sur l’aflatoxine applicable aux secteurs informel et commercial.

Le CTA continuera à œuvrer en partenariat avec le PACA et d’autres partenaires africains et internationaux en vue de poursuivre la lutte contre la contamination par l’aflatoxine en Afrique, notamment en accélérant la coopération avec le secteur privé afin d’améliorer la production agricole, l’agroalimentaire et le commerce, ainsi que la santé et la nutrition.


Pour en savoir plus Télécharger le rapport final de la table ronde (en anglais)
Télécharger le rapport 2016 : Improving the evidence base on aflatoxin contamination and exposure in Africa (en anglais)